L'adulte roi : un pari amoureux risqué
Posté : mer. 7 sept. 2016 14:40
Je vais parler de l'adulte roi au masculin. Ce comportement n'est pourtant pas l'apanage des hommes, les femmes adultes reines sont pléthore.
Ce n'est donc pas une question de genre mais de personnalité construite sur l'exacerbation du moi et de sa volonté de plaisir absolu. (…)
Tel un enfant qui convoite un beau jouet, l'adulte roi croit très vite au grand amour dès que son ego peut être désiré. (...)
Il y a toujours eu une relation narcissique dans la séduction amoureuse. Personne ne peut nier cette jouissance de l'état amoureux, celle de l'être aimé qui est fou d'amour et ne cesse de nous renvoyer combien nous sommes uniques dans notre beauté, dans notre intelligence, dans notre façon de vivre. Ne dit-on pas dans les expressions populaires de bon sens, que « l'amour rend aveugle » ?
Quoi qu'il en soit nous serions bien stupides de ne pas profiter de cette lune de miel des rapports amoureux qui savent transcender ce que nous sommes: nous passons d'une sorte d'anonymat à la lumière du regard de l'autre, nous sommes aimés !
Les plus sages sauront dépasser cette période passionnelle (d'aveuglement ?) et construiront peu à peu une vraie relation d'amour : un amour qui se consolide non pas seulement sur les apparences, sur les bénéfices secondaires de chacun, sur l'unique jouissance des ego respectifs valorisés, mais qui devient progressivement l'amour de l'autre pour ce qu'il est, pour ses valeurs de vie, pour sa façon d'être au monde. Bref, un amour qui n'a rien à voir avec les envolées lyriques des premiers jours, des mois ou des années de l'état amoureux, mais un amour vrai, voulu, profond, reconnu et surtout construit.
Les rares fois où un adulte au roi consulte au cabinet c'est pour répondre à une demande pressante d'un conjoint qui réclame un travail sur soi, une remise en cause de son comportement quotidien dans le couple, au risque d'une rupture imminente. Bref, il vient consulter sous la menace de perdre son objet d'amour.
Quand le conjoint espère un véritable regard sur soi et sa philosophie de vie, l'adulte roi va tenter de mettre le psy dans sa poche.
S'il ressent une petite honte à quitter celle autrefois aimée, il veut surtout éprouver le moins de culpabilité possible. Il n'est pas question de regard sur soi mais d’obtenir l'approbation de l’ex qui croit à sa volonté de changement et à celle du psy qui risque de lui renvoyer, sans jugement aucun, que sa décision de vie lui appartient. (...)
Les femmes adultes reines aiment, elles aussi, de façon déroutante. Parfois qualifiées d'histrioniques, d'allumeuses, la vérité est plus banale et leur pathologie est celle de leur comparse masculin : « Je désire ce que j'ai envie et cesserai d'aimer ce dont je n'aurai plus envie...»
(...)
Nous l'avons dit, la personnalité profondément égocentrique des adultes rois n'est pas l'apanage des hommes et comme pour les enfants rois ou les adolescents rois, c'est l'égalité entre hommes et femmes, la parité parfaite...
(...)
Ce fonctionnement est difficile à accepter lorsqu'on éprouve de vrais sentiments et mon patient en avait. Il prenait conscience qu'il passait toujours en numéro 2 dès que l'envie de cette adulte reine changeait.
(…)
La victime de l'amour égocentrique est, répétons-le, chosifié, elle n'est qu'un objet de consommation à un moment donné. Il n'est, bien sûr, pas interdit de consommer ce genre de relation, mais à la condition de savoir aimer soi-même égoïstement. Sinon, le risque de bovarysme n'est pas loin : le partenaire romantique perd beaucoup au jeu des égocentriques. Il paiera l'addition, aura le cœur brisé, il sera la perpétuelle victime de celui ou celle dont l’ego démesuré met à l'abri de toute souffrance.
(...)
Et lorsque vous le retrouvez et que vous lui faites la remarque qu'il est inconstant, peu fiable, voire grossier, il vous expliquera tout de go qu'il n'avait pas envisagé que vous puissiez être blessé.
Il sait alors plaider sa cause, fond en regrets de toutes sortes, promet l’impossible et retrouve toutes les armes de la séduction : le sourire qu'il faut, la caresse appropriée, les déclarations qui anesthésient… Et ce profil bas, style Calimero, nous fait craquer et nous fait croire qu'il ne l'a pas fait exprès, il n'y aura plus de tel comportement à l'avenir. Et comme il est grand jouisseur de la vie, il nous emporte dans son envie présente. S'il est avec vous c'est bien qu’il le désire ce jour-là. Son entrain, sa joie de vivre, ses flatteries ont vite fait de tuer nos dernières velléités de jugement voir de remise en cause. Lorsqu'il aime, il est irrésistible. Le problème c'est qu'il aime par intermittence et si vous acceptez ce courant alternatif, gare aux pannes de courant.
(...)
L'adulte roi est le plus souvent polygame. Imaginez-vous cet insatiable gourmand de la vie se contenter de la même pâtisserie tous les jours ? Cette problématique est parfois légitime lorsqu'un couple connaît des pertes de désir, c'est souvent une étape difficile. Pour l'adulte roi, cela ne pose aucune question, il n'a été que très rarement monogame. Combien de fois ai-je entendu telle ou telle patient m’avouer, après quelques séances, qu'il y avait toujours eu beaucoup de partenaires au même moment ? (…)
La frustration est constamment niée, évitée chez lui. Le problème majeur de cette pathologie du principe de réalité est non seulement qu'elle est destructrice pour son auteur, mais qu'elle entraîne aussi l'autre, surtout dans la relation amoureuse, dans la détresse.
(...)
Il n'est déjà pas facile pour le commun des mortels d'admettre avoir tort (...)
Alors pour notre adulte roi, c'est une démarche impossible : reconnaître qu'il est le seul responsable d'une histoire de couple qui se délite est au-dessus de ses forces.
Je me souviens de Justin, autre souffre-douleur d'une femme égocentrique. Il me disait combien il avait tenté de renvoyer sa compagne à sa propre responsabilité et obtenez invariablement les mêmes réponses : « Tu me reproches cela, mais souviens-toi à cette époque-là, je n'étais pas bien, j'avais tel souci, il s'est passé tel ou telle chose… Bref c'est le fameux théorème : si j'ai mal agit c'est que les circonstances ne m'ont pas aidée à faire autrement.
(…)
Celui qui décide de rompre, se voit rongé par la culpabilité face à cette pseudo souffrance et se laisse aisément séduire par les déclamations, les promesses, les faux serments. Comment un être humain normal peut-il concevoir que tout cela n'est qu'apparence, faux-semblants et que la seule souffrance de l'adulte roi et la douleur que ressent son ego et non l'absence de l'être aimé ?
Source : http://www.odilejacob.fr/catalogue/psyc ... 131195.php
Ce n'est donc pas une question de genre mais de personnalité construite sur l'exacerbation du moi et de sa volonté de plaisir absolu. (…)
Tel un enfant qui convoite un beau jouet, l'adulte roi croit très vite au grand amour dès que son ego peut être désiré. (...)
Il y a toujours eu une relation narcissique dans la séduction amoureuse. Personne ne peut nier cette jouissance de l'état amoureux, celle de l'être aimé qui est fou d'amour et ne cesse de nous renvoyer combien nous sommes uniques dans notre beauté, dans notre intelligence, dans notre façon de vivre. Ne dit-on pas dans les expressions populaires de bon sens, que « l'amour rend aveugle » ?
Quoi qu'il en soit nous serions bien stupides de ne pas profiter de cette lune de miel des rapports amoureux qui savent transcender ce que nous sommes: nous passons d'une sorte d'anonymat à la lumière du regard de l'autre, nous sommes aimés !
Les plus sages sauront dépasser cette période passionnelle (d'aveuglement ?) et construiront peu à peu une vraie relation d'amour : un amour qui se consolide non pas seulement sur les apparences, sur les bénéfices secondaires de chacun, sur l'unique jouissance des ego respectifs valorisés, mais qui devient progressivement l'amour de l'autre pour ce qu'il est, pour ses valeurs de vie, pour sa façon d'être au monde. Bref, un amour qui n'a rien à voir avec les envolées lyriques des premiers jours, des mois ou des années de l'état amoureux, mais un amour vrai, voulu, profond, reconnu et surtout construit.
Les rares fois où un adulte au roi consulte au cabinet c'est pour répondre à une demande pressante d'un conjoint qui réclame un travail sur soi, une remise en cause de son comportement quotidien dans le couple, au risque d'une rupture imminente. Bref, il vient consulter sous la menace de perdre son objet d'amour.
Quand le conjoint espère un véritable regard sur soi et sa philosophie de vie, l'adulte roi va tenter de mettre le psy dans sa poche.
S'il ressent une petite honte à quitter celle autrefois aimée, il veut surtout éprouver le moins de culpabilité possible. Il n'est pas question de regard sur soi mais d’obtenir l'approbation de l’ex qui croit à sa volonté de changement et à celle du psy qui risque de lui renvoyer, sans jugement aucun, que sa décision de vie lui appartient. (...)
Les femmes adultes reines aiment, elles aussi, de façon déroutante. Parfois qualifiées d'histrioniques, d'allumeuses, la vérité est plus banale et leur pathologie est celle de leur comparse masculin : « Je désire ce que j'ai envie et cesserai d'aimer ce dont je n'aurai plus envie...»
(...)
Nous l'avons dit, la personnalité profondément égocentrique des adultes rois n'est pas l'apanage des hommes et comme pour les enfants rois ou les adolescents rois, c'est l'égalité entre hommes et femmes, la parité parfaite...
(...)
Ce fonctionnement est difficile à accepter lorsqu'on éprouve de vrais sentiments et mon patient en avait. Il prenait conscience qu'il passait toujours en numéro 2 dès que l'envie de cette adulte reine changeait.
(…)
La victime de l'amour égocentrique est, répétons-le, chosifié, elle n'est qu'un objet de consommation à un moment donné. Il n'est, bien sûr, pas interdit de consommer ce genre de relation, mais à la condition de savoir aimer soi-même égoïstement. Sinon, le risque de bovarysme n'est pas loin : le partenaire romantique perd beaucoup au jeu des égocentriques. Il paiera l'addition, aura le cœur brisé, il sera la perpétuelle victime de celui ou celle dont l’ego démesuré met à l'abri de toute souffrance.
(...)
Et lorsque vous le retrouvez et que vous lui faites la remarque qu'il est inconstant, peu fiable, voire grossier, il vous expliquera tout de go qu'il n'avait pas envisagé que vous puissiez être blessé.
Il sait alors plaider sa cause, fond en regrets de toutes sortes, promet l’impossible et retrouve toutes les armes de la séduction : le sourire qu'il faut, la caresse appropriée, les déclarations qui anesthésient… Et ce profil bas, style Calimero, nous fait craquer et nous fait croire qu'il ne l'a pas fait exprès, il n'y aura plus de tel comportement à l'avenir. Et comme il est grand jouisseur de la vie, il nous emporte dans son envie présente. S'il est avec vous c'est bien qu’il le désire ce jour-là. Son entrain, sa joie de vivre, ses flatteries ont vite fait de tuer nos dernières velléités de jugement voir de remise en cause. Lorsqu'il aime, il est irrésistible. Le problème c'est qu'il aime par intermittence et si vous acceptez ce courant alternatif, gare aux pannes de courant.
(...)
L'adulte roi est le plus souvent polygame. Imaginez-vous cet insatiable gourmand de la vie se contenter de la même pâtisserie tous les jours ? Cette problématique est parfois légitime lorsqu'un couple connaît des pertes de désir, c'est souvent une étape difficile. Pour l'adulte roi, cela ne pose aucune question, il n'a été que très rarement monogame. Combien de fois ai-je entendu telle ou telle patient m’avouer, après quelques séances, qu'il y avait toujours eu beaucoup de partenaires au même moment ? (…)
La frustration est constamment niée, évitée chez lui. Le problème majeur de cette pathologie du principe de réalité est non seulement qu'elle est destructrice pour son auteur, mais qu'elle entraîne aussi l'autre, surtout dans la relation amoureuse, dans la détresse.
(...)
Il n'est déjà pas facile pour le commun des mortels d'admettre avoir tort (...)
Alors pour notre adulte roi, c'est une démarche impossible : reconnaître qu'il est le seul responsable d'une histoire de couple qui se délite est au-dessus de ses forces.
Je me souviens de Justin, autre souffre-douleur d'une femme égocentrique. Il me disait combien il avait tenté de renvoyer sa compagne à sa propre responsabilité et obtenez invariablement les mêmes réponses : « Tu me reproches cela, mais souviens-toi à cette époque-là, je n'étais pas bien, j'avais tel souci, il s'est passé tel ou telle chose… Bref c'est le fameux théorème : si j'ai mal agit c'est que les circonstances ne m'ont pas aidée à faire autrement.
(…)
Celui qui décide de rompre, se voit rongé par la culpabilité face à cette pseudo souffrance et se laisse aisément séduire par les déclamations, les promesses, les faux serments. Comment un être humain normal peut-il concevoir que tout cela n'est qu'apparence, faux-semblants et que la seule souffrance de l'adulte roi et la douleur que ressent son ego et non l'absence de l'être aimé ?
Source : http://www.odilejacob.fr/catalogue/psyc ... 131195.php